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5-Des Å“uvres

I-5. Des bonnes œuvres

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{11} 1. Dans le dernier sermon, vous avez entendu ce qu'est la foi vivante et vraie d'un Chrétien, et qu'elle n'autorise pas la paresse, mais travaille à produire des œuvres bonnes, selon l'occasion. Aujourd'hui, par la grâce de Dieu, nous examinerons la seconde chose notée à propos de la foi, sans laquelle aucune œuvre bonne ne peut être faite qui soit acceptable et agréable à Dieu. Car « comme une branche ne peut pas produire son propre fruit » dit Christ notre Sauveur, « à moins qu'elle ne soit rattachée à la vigne, ainsi vous ne pouvez pas produire de fruit si vous ne demeurez en moi. Je suis la vigne et vous êtes les branches. Celui qui habite en moi et moi en lui produit beaucoup de fruit, car sans moi vous ne pouvez rien faire ». Et St Paul prouve qu'Enoch avait la foi, car il a plu à Dieu, car sans la foi, dit-il « il est impossible de plaire à Dieu ». Et il dit encore aux Romains : « Toute œuvre qui est faite sans la foi, est un péché».

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La foi donne vie à l'âme et ceux qui manquent de foi sont aussi morts aux yeux de Dieu que le sont ceux dont les corps manquent d'âme. Sans la foi, nous sommes morts au regard de Dieu, bien que le résultat ne soit ni si joyeux ni si glorieux à visée humaine. De même qu'une gravure ou une peinture n'est qu'une représentation morte de la chose en soi, inerte et sans vie, ainsi sont les œuvres de tous les incroyants aux yeux de Dieu. Elles ressemblent à des œuvres de vie, et en fait elles sont mortes, ne bénéficiant pas de la vie éternelle. Elles ne sont que des ombres et des représentations de choses bonnes et vivantes, mais elles ne sont pas la réalité. Car la vraie foi fait vivre les œuvres, et d'une telle foi proviennent des œuvres bonnes qui sont très bonnes en réalité, et sans la foi aucune œuvre n'est bonne aux yeux de Dieu.

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Comme le dit St Augustin : « Nous ne devons pas placer les œuvres avant la foi, ni penser qu'avant de croire un homme puisse faire aucune œuvre bonne. Car de telles œuvres, bien qu'elles semblent dignes de louange aux hommes, ne sont en fait que vanités » et ne sont pas admises devant Dieu. « Il sont comme un cheval qui a dévié du chemin, ce qui lui a coûté de grands efforts, mais sans résultat. Que personne donc », dit-il « n'estime ses bonnes œuvres supérieures à sa foi, tandis que là où il n'y a pas la foi, les œuvres bonnes n'existent pas. L'intention », dit-il, « fait les bonnes œuvres, mais la foi doit guider et commander l'intention de l'homme ». Et Christ a dit : « Si ton œil est éteint, alors c'est tout ton corps qui est rempli de ténèbres ». « Le regard révèle l'intention », dit St Augustin, « avec laquelle un homme fait une chose ». De telle sorte que celui qui ne fait pas ses œuvres avec une intention pieuse et une vraie « foi qui agit par amour », tout le corps (c'est à dire toutes ses œuvres) est ténèbres, et il n'y a pas de lumière en lui. Car les œuvres bonnes ne sont pas mesurées par le fait même et discernées ainsi des vices, mais par les fins et intentions pour lesquelles elles sont faites. Si un païen habille un homme nu, nourrit des affamés et fait d'autres œuvres semblables, parce qu'il ne les fait pas dans la foi pour l'honneur et l'amour de Dieu, elles sont mortes, vaines et sans fruit pour lui. La foi est ce qui recommande les œuvres à Dieu, car comme St Augustin l'a dit : « Que vous le vouliez ou non, l’œuvre qui ne vient pas de la foi est nulle ». Si la foi de Christ n'est pas à la base, il n'y a pas d'œuvre bonne qui tienne, quoi que nous bâtissions dessus. Il y a une seule œuvre par laquelle toutes les œuvres sont bonnes, c'est la « foi qui agit par charité ». Si vous avez cette foi, vous avez le bon terrain pour toute œuvre bonne, car les vertus de force, sagesse, tempérance et justice découlent toutes de cette même foi. Sans cette foi nous ne les avons pas, mais seulement leurs noms et leurs ombres, ainsi que St Augustin l'a dit : « Toute la vie de ceux qui manquent de la vraie foi est péché, et rien n'est bon sans Celui qui est l'auteur de toute bonté ; là où Il n'est pas, il n'y a que semblant de vertu, même dans les meilleurs œuvres ». Et St Augustin de citer ce verset du psaume : « Le moineau a trouvé un nid où il peut garder ses oisillons », dit que les Juifs, les hérétiques et les païens font de belles œuvres ; ils habillent ceux qui sont nus, nourrissent les pauvres et font d'autres œuvres de miséricorde, mais parce qu'elles ne sont pas faites avec la vraie foi, les oisillons seront perdus. Mais si elles reposent dans la foi, alors la foi est le nid qui sauvegarde les oisillons, c'est à dire sauvegarde les œuvres bonnes, de telle sorte que leur récompense n'est pas totalement perdue.

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Et sur ce sujet, sur lequel St Augustin discute longuement dans de nombreux livres, St Ambroise conclut en peu de mots, disant : « Celui qui par nature résiste au vice, soit par volonté naturelle ou par la raison, remplit en vain sa vie et n'atteint pas les vraies vertus, car sans la louange du vrai Dieu ce qui semble vertu n'est que vice ».

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Et St Jean Chrysostome a écrit très clairement à ce propos : « Vous en trouverez beaucoup qui n'ont pas la vraie foi et qui ne sont pas du troupeau de Christ, et cependant il apparaît qu'ils abondent en bonnes œuvres de miséricorde. Vous les trouverez pleins de pitié, de compassion, et adonnés à la justice, et malgré cela, ils ne tirent aucun profit de leurs œuvres parce que l'œuvre maîtresse manque». Car quand les Juifs ont demandé à Christ ce qu'il faudrait faire pour accomplir des œuvres bonnes, Il répondit : « C'est l'œuvre de Dieu que de croire en Celui qu'Il a envoyé », de telle sorte qu'Il a appelé foi l'œuvre de Dieu. Et aussitôt qu'un homme reçoit la foi, il abonde en œuvres bonnes, car la foi est en soi pleine d'œuvres bonnes, et « sans la foi, rien n'est bon ». Et par similitude, Il a dit que « Ceux qui brillent par leurs bonnes œuvres sans la foi en Dieu sont comme des morts, qui ont de belles tombes de luxe et cela ne leur sert de rien ». « La foi peut ne pas être nue sans œuvres, car alors ce n'est pas la vraie foi, et quand elle est unie aux œuvres, elle se place au-dessus des œuvres. Car comme les hommes, tout en étant hommes, naissent et sont ensuite nourris, notre foi doit naître et être ensuite nourrie avec des œuvres de foi. Et la vie peut exister sans nourriture, mais na nourriture ne peut pas exister sans la vie ». Un homme a besoin d'être nourri par des œuvres bonnes et salutaires, mais il doit d'abord avoir la foi. Celui qui fait de bonnes actions, sans la foi, n'a pas la vie. Je peux vous indiquer un homme qui, sans œuvres, a vécu par la foi et est monté au ciel, mais sans la foi, jamais un homme n'aura la vie : Le voleur qui fut crucifié quand Christ a souffert n'a fait que croire, et le Dieu très miséricordieux l'a justifié. Et parce que personne ne peut dire qu'il n'a pas eu le temps de faire d'œuvres bonnes, car sinon il en aurait faites, la vérité, que je ne peux pas contester, est qu'il fut justifié ; mais j'affirmerai sûrement ceci, que seule la foi l'a sauvé. S'il avait vécu sans se soucier de la foi et de ses œuvres, il aurait perdu son Salut. Mais c'est la conséquence de ce que je vous dis que la foi seule l'a sauvé, et que les œuvres en soi n'ont jamais justifié personne. Ici, nous avons examiné la pensée de St Chrysostome par laquelle vous pouvez percevoir que la foi n'est jamais sans œuvres, si elle en a l'opportunité ; et que les œuvres ne peuvent mériter la vie éternelle, sans la foi.

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{12} 2. Des trois choses qui ont été spécialement dites de la foi vivante dans le précédent sermon, deux vous ont été exposées. La première était que la foi n'est jamais oisive, sans œuvres bonnes quand l'occasion s'en présente ; la seconde, que les œuvres bonnes qui sont acceptables par Dieu ne peuvent pas être faites en dehors de la foi. Dans la troisième partie, nous examinerons maintenant quelles sortes d'œuvres sont susceptibles d'être engendrées par la vraie foi et de conduire les hommes de foi à la vie éternelle.

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Nul ne sait mieux cela que notre Sauveur Jésus-Christ Lui-même, à qui un grand homme posa la même question. « Quelles œuvres devrai-je faire ? », dit un prince, « pour obtenir la vie éternelle? ». Jésus lui répondit : « Si tu veux obtenir la vie éternelle, garde les Commandements ». Mais le prince, non content de cette réponse, demanda alors : « Quels commandements ? ». Les scribes et les Pharisiens avaient un si grand nombre de lois et de traditions de leur crû, à côté des Commandements de Dieu, et propres à amener les hommes au ciel, que cet homme doutait sur le point de savoir s'il devait suivre des lois et traditions pour aller au ciel ou bien les Lois de Dieu ; il a donc demandé à Christ de quels commandements il voulait parler. Sur quoi Christ lui fit une réponse claire, répétant les Commandements de Dieu, et disant : « Tu ne tueras pas, tu ne seras pas adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de faux témoignage, honore ton père et ta mère » et « aime ton prochain comme toi-même ». Par ces mots, Christ déclarait que les Lois de Dieu sont la voie qui mène à la vie éternelle, et pas les traditions et les lois des hommes. Ceci doit donc être pris pour une leçon très vraie enseignée de la bouche même de Christ, selon laquelle les œuvres appliquant la Loi morale de Dieu sont les œuvres de foi qui conduisent à la vie bénie à venir.

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Mais l'aveuglement et la malice des hommes, depuis le tout début, les a toujours incités à se détourner des Commandements de Dieu. Tel Adam, le premier homme, qui n'avait qu'un seul commandement à respecter, qui écouta la femme séduite par la subtile persuasion du serpent et n'en fit qu'à sa tête, laissant de côté le commandement de Dieu. Et depuis ce jour, toute sa descendance a été si aveuglée par le péché originel qu'elle a toujours été prête à désobéir à Dieu et à sa Loi, inventant de son propre chef une nouvelle voie de Salut par les œuvres ; au point que le monde presque tout entier, oubliant le véritable honneur dû au seul Dieu éternel, a divagué selon sa fantaisie, rendant un culte qui au soleil, à la lune, aux étoiles, qui à Jupiter, Junon, Diane, Saturne, Apollon, Neptune, Cérès, Bacchus et autres hommes et femmes décédés. Quelques-uns, n'étant pas encore satisfaits, ont rendu un culte à diverses espèces de bêtes, oiseaux, poissons, volailles et serpents ; chaque pays, chaque ville, chaque maison était divisé, installant des images de tout ce qu'ils aimaient, et leur rendaient un culte. Les hommes étaient devenus si grossiers après avoir cédé à leurs fantasmes et quitté le Dieu vivant et éternel et Ses Commandements, qu'ils ont conçu des images et des dieux innombrables. Ils sont restés dans cette erreur et aveuglement jusqu'au moment où Dieu Tout-Puissant, ayant pitié de l'aveuglement des hommes, a envoyé son vrai prophète Moïse dans le monde pour réprouver cette folie extrême et les réprimander, et pour enseigner au peuple à connaître le seul Dieu vivant et son vrai culte.

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Mais l'inclination corrompue de l'homme le portait si bien à suivre ses propres fantasmes et (comme on dit) à favoriser sa propre couvée, celle qu'il a élevée par lui-même, que toutes les admonitions, exhortations, bénédictions et menaces de Dieu ne l'ont pas détourné de ses inventions. Car malgré toutes les bénédictions de Dieu envers le peuple d'Israël, quand Moïse gravit la montagne pour parler avec le Dieu Tout-Puissant, il y avait tardé quelques jours seulement lorsque le peuple a commencé à inventer de nouveaux dieux, comme il leur passait par la tête, et ils ont fabriqué un veau d'or, se sont agenouillés et lui ont rendu un culte. Après quoi ils ont suivi les Moabites et rendu un culte à Baal-Péor, le dieu des Moabites. Lisez le livre des Juges, les livres des Rois et les Prophètes, et vous y verrez à quel point le peuple était inconstant, plein d'inventions et plus enclin à courir après ses propres fantasmes que de suivre les très saints Commandements de Dieu. Vous y trouverez Baal, Moloch, Chemosh, Milcom, Baal-Péor, Astarté, Bel, le Dragon, Priape, le serpent de la honte, les douze signes du zodiaque, et de nombreux autres, dont le peuple louait les images avec une grande dévotion, inventant des pèlerinages, les installant dans des niches précieuses et les encensant, s'agenouillant devant elles et leur faisant des offrandes, pensant que c'était très méritoire devant Dieu que de s'estimer au-dessus des préceptes et Commandements de Dieu. Et pendant que Dieu ordonnait qu'aucun sacrifice ne soit fait en dehors de Jérusalem, ils ont fait exactement le contraire, bâtissant des autels pour y faire des sacrifices partout, sur les collines, dans les forêts et dans les maisons, ne respectant pas les Commandements de Dieu, mais estimant que leurs fantasmes et dévotions étaient meilleures. Et ces erreurs se sont si bien répandues que non seulement les ignorants mais les prêtres et les enseignants du peuple aussi, en partie par orgueil et par avarice, se sont corrompus, et en partie par ignorance se sont aveuglément trompés avec ces abominations ; à tel point que le roi Achab, n'avait qu’Élie comme véritable enseignant et serviteur de Dieu, alors qu'il y avait 150 prêtres pour le persuader d'honorer le Baal et pour faire des sacrifices dans les forêts ou les bosquets. Et cette horrible erreur continua ainsi jusqu'à ce que trois nobles rois, comme Josaphat, Ézéchias et Josias, des serviteurs choisis par Dieu, les détruisent complètement, et ils ont ramené le peuple, de ses inventions aux Commandements de Dieu, car la récompense éternelle et la gloire demeure éternellement avec Lui.

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Et à côté de ces inventions, l'inclination de l'homme est de concevoir de lui-même ses propres dévotions, avec de nouvelles sectes et religions, appelées Pharisiens, Sadducéens et scribes, et avec de nombreuses traditions et ordonnances, ainsi qu'il semblait de par les apparences extérieures et le scintillement des bonnes œuvres, lesquelles tendaient toutes à l'idolâtrie, à la superstition et à l'hypocrisie; leur cœur étant rempli de malice, d'orgueil, d'envie et de méchanceté. C'est contre ces sectes et leur prétendue sainteté que Christ a crié le plus fort, disant et répétant souvent ces paroles : « Maudits êtes-vous, scribes et Pharisiens hypocrites ! Car vous lavez l'extérieur du plat, mais l'intérieur est plein de saleté et de rapines. Toi le Pharisien aveugle et hypocrite, commence par laver l'intérieur du plat ». Car nonobstant toutes les traditions et exhibitions de bonnes œuvres conçues de leur propre imagination, se faisant passer pour les plus religieux et les plus saints de hommes, Christ voyait dans leurs cœurs, savait qu'ils étaient très impies aux yeux de Dieu, très abominables et les plus éloignés de Dieu de tous les hommes. C'est pourquoi il leur dit : « Hypocrites, le prophète Ésaïe a bien parlé de vous quand il disait : Ce peuple M'honore des lèvres mais son cœur est loin de moi ; il M'honore en vain en enseignant des doctrines et des commandements humains. Car vous laissez de côté les Commandements de Dieu au profit de vos propres traditions ». Et bien que Christ ait dit qu'ils louaient Dieu en vain ceux qui enseignent des doctrines et des commandements humains, Il ne voulait pas par là renverser tous les commandements humains, car Il obéissait lui-même aux princes et à leurs lois, faites pour le bon ordre et la gouvernance du peuple, mais Il réprouvait les lois et les traditions faites par les scribes et les Pharisiens qui n'étaient pas faites seulement pour le bon ordre du peuple (comme les lois civiles), mais elles étaient exaltées si haut qu'elles remplaçaient le vrai et pur culte de Dieu, comme s'ils avaient été Ses égaux ou au-dessus de Lui ; car la plupart des Lois de Dieu n'étaient plus observées, mais affaiblies au point de laisser la place à leurs commandements humains. Dieu détestait cette arrogance, laquelle consistait à tant pousser en avant les lois humaines qu'elles en devenaient égales aux Lois de Dieu, même en ce qui concernait le culte de Dieu, et à omettre Ses lois cultuelles. Dieu avait édicté Ses Lois, par lesquelles il voulait être honoré. Il lui plaît aussi que toutes les lois humaines qui ne sont pas contraires à Ses Lois divines soit observées et gardées comme bonnes et nécessaires au bien commun, mais pas en ce qui concerne l'honneur et le culte à Lui rendre. Et toutes les lois civiles sont ou devraient être faites pour amener les hommes à mieux obéir aux Lois de Dieu ; et par conséquent que Dieu en soit mieux honoré. Mais les scribes et les Pharisiens n'étaient pas contents que leurs lois ne soient pas au-dessus des lois civiles et du droit positif, ils ne les auraient même pas appelées des lois comme les autres ; mais ils les appelaient saintes et divines traditions, et les mettaient en estime publique non seulement pour le culte de Dieu (comme la Loi de Dieu, en fait), mais encore comme le culte divin le plus élevé, auquel les Commandements de Dieu devaient céder la place. C'est pour cette raison que Christ leur a parlé de façon si véhémente, en disant : «Vos traditions, si estimées des hommes qu'elles soient, sont des abominations pour Dieu ».

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Car ces traditions étaient issues de la transgression des Commandements de Dieu et de la dévotion qui Lui est due, et il était plus grave de les enfreindre que les Commandements de Dieu. Ainsi, les scribes et les Pharisiens observaient le Sabbat de manière si scrupuleuse et superstitieuse qu'ils étaient choqués parce que Christ guérissait des malades, et que ses Apôtres affamés arrachaient des épis de blé pour manger ce jour là. Et parce que ses disciples ne se lavaient pas les mains aussi souvent que les traditions l'exigeaient, les scribes et les Pharisiens se querellaient avec Christ en disant : « Pourquoi les disciples ne respectent pas les traditions des anciens ? ». Mais Christ leur répondait qu’eux-mêmes, pour que leurs propres traditions soient observées, enseignaient carrément aux hommes à enfreindre tous les Commandements de Dieu. Car ils enseignaient au peuple une dévotion telle qu'elle les obligeait à offrir leurs biens au Trésor du Temple, sous prétexte d'honorer Dieu, laissant leurs pères et mères (à qui ils devaient tout) sans soutien ; et ainsi ils enfreignaient le Commandement de Dieu (honore ton père et ta mère) pour observer leur propre tradition. Ils avaient plus d'estime pour un serment fait sur l'or du Temple que pour un serment fait sur le Nom de Dieu lui-même ou que sur le Temple. Ils étaient plus appliqués à payer la dîme sur les petites choses que sur des choses plus importantes, ordonnées par Dieu, comme faire des œuvres de miséricorde, rendre la justice ou être honnête en affaires et dignes de la confiance de Dieu et des hommes. « Il fallait faire ces choses » dit Christ, « et ne pas omettre les autres ». Bref, leur jugement était si aveuglé qu'ils se prenaient les pieds sur une paille et enjambaient un rocher ; ils auraient ainsi gentiment enlevé une mouche de leur tasse, et ils auraient bu un chameau tout entier. Pour cette raison, Christ les appelait des guides aveugles, avertissant de temps en temps ses disciples d'éviter leur enseignement. Car bien qu'ils apparaissaient au monde comme des hommes parfaits par leur mode de vie et leur enseignement, leur vie n'était qu'hypocrisie et leur doctrine un levain amer mêlé de superstition, d'idolâtrie et de préjugés, établissant leurs traditions et ordonnances en lieu et place des Commandements de Dieu.

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{13} 3. Que tout homme puise juger droitement des œuvres qui sont bonnes, il a été question dans la seconde partie de ce sermon, ainsi que de quelles sortes d'œuvres bonnes Dieu voudrait voir accomplir, nommément celles qu'il a commandées dans Sa Sainte Écriture, et pas les œuvres imaginées dans les cervelles d'un zèle et d'une dévotion aveugles, en dehors de la Parole de Dieu. Et en se méprenant sur la nature des bonnes œuvres, l'homme a très hautement déplu à Dieu et tourné le dos à Sa volonté et à Ses Commandements. Ainsi, vous avez entendu combien le monde, depuis le commencement jusqu'à l'époque de Christ, a toujours été prêt à déchoir des Commandements de Dieu pour rechercher d'autres moyens de L'honorer et de Le servir selon une dévotion imaginée dans leurs têtes, et comment ils ont fait passer leurs propres traditions au même niveau ou au-dessus des Commandements de Dieu. Ceci est arrivé aussi à notre époque (et ce n'en est que plus déplorable) pas moins que parmi les Juifs, par la corruption, ou tout au moins par la négligence de ceux qui auraient dû les premiers préférer les Commandements de Dieu et préserver la pure doctrine céleste que Christ nous a laissée.

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Quel homme, ayant un tant soit peu de jugement ou d'instruction jointe à un vrai zèle pour Dieu, ne verrait pas et ne se lamenterait pas de voir une telle fausse doctrine, la superstition, l'idolâtrie, l'hypocrisie et d'autres énormités et abus investir petit à petit avec son levain amer la religion de Christ, le doux pain de la sainte Parole de Dieu s'en trouvant entravé et délaissé ? Même les Juifs, au pire moment de leur aveuglement, n'ont jamais eu autant de pèlerinages aux images, ni usé de tant d'agenouillements, embrassades et encensements de statues comme de notre temps. Les sectes et les fausses religions n'étaient pas si nombreuses parmi les Juifs, ni plus abusivement superstitieuses et impies que parmi nous, à une époque récente. Lesquelles sectes et religions comportaient tant d'œuvres hypocrites et contrefaites que leurs lampes, comme elles le disaient, dans leurs institutions de religion (comme elles les appelaient de façon arrogante), étaient toujours allumées, de façon à compenser non seulement leurs propres péchés, mais aussi ceux de tous leurs bienfaiteurs, frères et sœurs en religion, ainsi qu'ils en avaient très astucieusement et d'une manière sacrilège persuadé la multitude des ignorants ; entretenant en maints endroits des sortes de marchés ou de bourses aux mérites, remplis de leurs saintes reliques, images, autels et œuvres surérogatoires en surabondance, proposés à la vente. Et toutes ces choses étaient appelées saintes, saintes capes, saintes tuniques, saints chapelets du pardon, saints souliers, saintes règles et tout un fatras de sainteté. Et qu'est-ce qui est plus insensé, plus superstitieux ou impie que ces hommes, femmes et enfants devant porter une robe de bure pour les délivrer des fièvres ou de la peste, soit au moment de mourir, soit pour être enterrés, dans l'espoir qu'en les mettant sur eux ils seraient sauvés ? Laquelle superstition, grâce à Dieu, a été peu pratiquée dans ce royaume [d'Angleterre], bien que dans d'autres royaumes elle ait été et est encore pratiquée aujourd'hui par maintes personnes, tout aussi bien instruites qu'ignorantes.

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Mais pour passer rapidement sur les innombrables superstitions consistant en vêtements bizarres, dans le silence, les dortoirs, les cloîtres, les chapîtres, le choix des viandes et des boissons, et autres choses de la sorte, considérons quelles énormités et abus ont existé dans les trois principaux points, qu'ils appelaient les trois vœux essentiels de la religion : l'obéissance, la chasteté et la pauvreté volontaire. Le premier point vise l'obédience à leur père en religion (une obéissance inventée par eux) qui les exemptait canoniquement d'obéir à l'empereur et au roi et à tout pouvoir temporel, à qui ils étaient tenus d'obéir par les lois de Dieu. Ainsi, leur profession d'obéissance indue était en fait une renonciation à obéir comme ils le devaient. Et quant à savoir comment ils observaient leur vœu de chasteté, l'honnêteté et la décence nous obligent à le passer sous silence en laissant le monde juger de ce qu'on connaît bien, plutôt que d'avoir à exprimer leur vie peu chaste avec des mots peu chastes et d'offenser des oreilles chastes et pieuses. Et quant à leur pauvreté volontaire, elle était telle qu'en matière de propriétés, de joyaux, de vaisselle et de richesses ils étaient à égalité sinon au-dessus des négociants, des nobles, barons, comtes et ducs, de par ce sophisme subtil de « propriété communautaire », ils se moquaient du monde, le persuadant que nonobstant leurs propriétés et richesses, ils appliquaient bien leur vœu et pratiquaient la pauvreté volontaire.

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Mais avec toutes leurs richesses ils ne pouvaient jamais aider leur père ni leur mère, ni aucune autre personne pauvre et en grand besoin, sans la permission de leur père abbé, prieur ou recteur. Et même, ils pouvaient taxer tout le monde, mais ils n'étaient pas obligés de donner l'aumône à qui que ce soit, non, pas même à qui les Lois de Dieu leur faisaient une obligation d’aider. Ainsi, de par leurs traditions et leurs règles, les Lois de Dieu ne s'appliquaient pas à eux, et on peut dès lors dire d'eux ce que Christ disait aux Pharisiens : « Vous annulez les Commandements de Dieu avec vos traditions. Vous honorez Dieu des lèvres, mais votre cœur est loin de Lui ». Et plus leurs prières de jour et de nuit étaient et longues, sous le prétexte d'une plus grande sainteté qu'elle gagnerait les faveurs des veuves et d'autres gens simples, afin qu'ils payent des trentaines de messes pour leur mari et amis, et les admettent dans leurs prières, plus la parole de Christ se vérifiait à leur sujet : « Maudits êtes-vous, scribes et Pharisiens hypocrites ! Car vous dévorez les maisons des veuves sous couleur de faire de longues prières, c'est pourquoi votre damnation sera plus grande. Malheur à vous, scribes et Pharisiens hypocrites ! Car vous parcourez la terre et la mer pour recruter plus de novices et de nouveaux frères, et quand ils sont reçus dans votre secte, vous en faites des enfants de l'enfer, pires que vous-mêmes ».

Gloire à Dieu qui a mis Sa lumière dans le cœur de Son fidèle et vrai serviteur de très fameuse mémoire, le Roi Henri VIII, et lui a donné la connaissance de Sa Parole et une solide appli-cation à rechercher la gloire de Dieu, et de se débarrasser de telles superstitions et actions pharisaïques inventées pas l'Anti-Christ, et établies contre la Parole de Dieu et contre la gloire de Son Nom très béni, comme il avait donné le même esprit aux très nobles et fameux princes Josaphat, Josias et Ézéchias. Que Dieu nous donne à tous, nous les fidèles et vrais sujets de son Altesse royale, de nous nourrir du bon et savoureux pain de la Parole de Dieu, et comme Christ l'a com-mandé, d'éviter tout le levain pharisaïque et papiste de la fausse religion humaine. Nous qui, bien que nous étions auparavant très abominables et opposés aux Commandements de Dieu et à la pure religion de Christ, exaltée comme une vie très pieuse et un plus haut état de perfection, comme si un homme était plus pieux et plus parfait en gardant les règles, traditions et déclarations des hommes plutôt que de garder les saints Commandements de Dieu.

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Passons brièvement sur les religions contrefaites et impies. Répétons quelques autres sortes de superstitions et abus papistes, comme les chapelets, les psaumes de Notre Dame, les rosaires, les 15 invocations à Jésus, les vers de St Bernard, les lettres de Ste Agathe, le purgatoire, les messes sacrificielles, les chemins de croix et les jubilés, les fausses reliques, la bénédiction des chapelets, des cloches, des pains, de l'eau, du buis, des cierges, de la flamme et de tant d'autres choses, des jeûnes superstitieux, des confréries, des pardons considérés comme une marchandise, qui ont été si estimés et abusés au grand préjudice de la gloire et des Commandements de Dieu qu'ils ont été estimés choses très saintes, pour atteindre la vie éternelle ou la rémission du péché. Oui, les inventions creuses, les cérémonies sans fruit et les lois impies, les décrets et conciles de Rome ont été si loin dans ce sens qu'on pensait que rien ne lui était comparable en autorité, sagesse, instruction et piété, de sorte que les lois de Rome, selon eux, devaient être acceptées par tous, tels les quatre Évangiles, auxquels toutes les lois des princes doivent céder la préséance, et les Lois de Dieu ont aussi été partiellement omises et moins estimées que leurs lois, décrets et conciles, avec leurs traditions et cérémonies, qui devaient être observées et révérées comme étant plus saintes, plus parfaites et rendant un culte plus parfait à Dieu, plus agréable à Dieu que de garder les Commandements de Dieu.

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L'inclination de l'homme est si corrompue, toujours superstitieusement adonné à fabriquer de nouvelles façons d'honorer Dieu de son propre chef pour en avoir plus d'affection et dévotion afin de les appliquer, et plutôt remplacer les Commandements de Dieu par des commandements humains, et les commandements humains par les Commandements de Dieu, oui, par les plus élevés, les plus saints et plus parfaits de tous les Commandements de Dieu. Ainsi tout était si confus, que les gens peu instruits, mais en petit nombre, savaient (ou au moins auraient pu savoir) et durent affirmer la vérité et séparer les Commandements de Dieu des commandements humains, sur lesquels ont prospéré l'erreur, la superstition, l'idolâtrie, la vaine religion, les préjugés, les grandes controverses, et les mœurs impies.

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Pour cette raison, comme vous avez quelque zèle pour le vrai et pur culte de Dieu, comme vous avez le souci de votre âme et de la vie à venir qui est tout à la fois sans effort et sans fin, appliquez-vous par-dessus tout à lire et à écouter la Parole de Dieu ; notez soigneusement quelle est Sa volonté, ce que vous avez à faire, et faites tous vos efforts pour les pratiquer. D'abord, vous devez avoir une foi en Dieu assurée et vous donner entièrement à Lui, L'aimer dans la prospérité comme dans l'adversité, et craindre de jamais L'offenser à nouveau. Et pour l'amour de Lui, aimez tous les hommes, amis et ennemis, parce qu'ils sont Sa Création à Son image et qu'ils sont rachetés par Christ, comme vous-mêmes. Mettez dans votre esprit de faire du bien à tous les hommes, selon vos possibilités, et de ne blesser personne. Obéissez à vos supérieurs, et gouverneurs, servez vos maîtres avec fidélité et empressement, aussi bien en leur absence qu'en leur présence, non par crainte de la punition mais par motif de conscience, sachant que vous y êtes obligés par les Commandements de Dieu.

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Ne désobéissez pas à vos parents, mais honorez-les, aidez-les et faites-leur plaisir comme vous le pouvez. N'oppressez personne, ne tuez personne, ne battez personne, ni ne scandalisez ni ne détestez personne, mais aimez tous les humains, dites du bien d'eux, aidez et secourez tous ceux que vous pouvez, oui, même les ennemis qui vous détestent, qui disent du mal de vous, et qui vous font du mal. Ne prenez pas le bien d'autrui, ni ne convoitez les biens des autres à tort, mais contentez-vous de ce que vous avez et donnez vos biens charitablement selon les besoins et si vous en êtes requis. Fuyez toute idolâtrie, sorcellerie et parjure. Ne commettez pas l'adultère, en aucune façon, ni la fornication ni d'autres atteintes à la chasteté en pensée ou en acte avec la femme d'aucun autre, veuve, servante ou autre. Et travaillez continuellement durant votre vie, à garder ainsi les Commandements de Dieu, en quoi consiste le principal, le pur et authentique culte rendu à Dieu, et que, lié à la foi, Dieu a voulu qu'il soit la vraie relation et le vrai chemin du ciel ; et vous ne manquerez pas, comme Christ l'a promis, d'arriver à cette vie éternelle bénie où vous vivrez dans la gloire et dans la joie, pour toujours avec Dieu. À qui soit la louange, l'honneur et la puissance, éternellement. Amen.

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