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SERMON pour le premier dimanche après Noël

Galates 4/1-7 ; Matthieu 1/18-25.

 

HÉRITIERS DU PÈRE ÉTERNEL

 

Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.

 

Tout Français devient héritier de ses parents, du seul fait de sa naissance. La responsabilité parentale de l'élever et de le faire instruire est fixée par le Code Civil. Dès la naissance, nous avons droit à une part réservataire sur les biens de nos parents, lesquels ne sont pas éternels.

 

Et c'est un des grands soucis de tous les parents : À qui iront nos biens, après notre mort ? Abraham se posait déjà la question en ces termes (Genèse 15/1-3) : « Après ces choses, la parole de l’Éternel fut adressée à Abram dans une vision, en disant : Abram, ne crains point, je suis ton bouclier, et ta grande récompense. Et Abram répondit : Seigneur Éternel, que me donneras-tu ? Je m'en vais sans [laisser] d'enfants [après moi], et celui qui a le maniement de ma maison c'est ce Dammésec Elihézer. Abram dit aussi : Voici, tu ne m'as point donné d'enfants ; et voilà, le serviteur né dans ma maison, sera mon héritier. ». Même si nos biens ne sont pas éternels, ils durent un peu plus longtemps que nous. Dans nos armoires, nous conservons du linge brodé par nos ancêtres plusieurs générations avant nous, pendant le temps où ils étaient fiancés. Même ces fragiles textiles nous survivent, alors que notre corps se dégrade dans la tombe, misérable squelette.

 

Nous avons à cœur de ne pas laisser nos enfants dans le dénuement. Longtemps, les parents mariaient leurs enfants en ayant le souci de leur assurer la sécurité d'une rente ou de revenus suffisants pour vivre décemment, si possible sans avoir à travailler. On pensait à faire naître ses petits-enfants dans la chaleur d'un foyer où rien ne manquerait, plutôt que dans une crèche rustique, parmi les bêtes, ou même sur le trottoir, comme Édith Piaf. Ces mariages imposés par la famille ont inspiré Molière, qui défendait les mariages d'amour. Aujourd'hui, le mariage est lui-même dévalué et ravalé à une formalité dont on se passe volontiers. Les mariages sont consommés dans l'intimité bien avant leur célébration, et si cette célébration a finalement lieu, elle est une fois sur deux suivie par un divorce douloureux, où le souci des biens matériels prime sur toute autre considération. On feint d'ignorer que le partage des biens entre divorcés est provisoire, car il sera remis en cause au moment du partage entre les héritiers. Ce sont les enfants qui recueilleront la succession de leurs parents, s'ils ne décèdent pas avant eux.

 

Maintenant, les enfants sont élevés en roitelets, à qui l'on demande leur consentement pour trop de choses : la nourriture, les vêtements, les loisirs, les lectures ; quand ce ne sont pas ces derniers qui commandent à la maison. Mais Dieu a parlé, et Il a défini l'enfant comme un serviteur de ses parents - et s'il sera leur héritier, cela ne viendra que plus tard. L'Épître aux Galates le précise ainsi (Galates 4/1) : « Or je dis que pendant tout le temps que l'héritier est un enfant, il n'est en rien différent du serviteur, quoiqu'il soit Seigneur de tout ». Et un serviteur doit obéissance à son maître. C'est ce que résume le mot obédience, qui est une obéissance à Dieu, telle que Christ l'impose à Ses disciples (Matthieu 28/19-20) : « Allez donc, et enseignez toutes les nations… les enseignant de garder tout ce que je vous ai commandé ».

 

(Galates 4/2) : « Mais il est sous des tuteurs et des curateurs jusqu'au temps déterminé par le père ». Dans l'Antiquité, les pères étaient fort occupés par leur travail aux champs, ou absents car ils servaient dans l'armée, ou voyageaient au loin pour leur commerce. Comme le mot marchand l'indique, les marchands marchaient de lieu en lieu, et même d'un pays à l'autre. Ils confiaient donc leur progéniture à la mère, et comme nombreuses étaient celles qui mouraient en couches, le père devait désigner un tuteur pour veiller sur eux et les élever en l'absence du père. Dans les contes de fées, ce tuteur était souvent une belle-mère, la nouvelle épouse du père devenu veuf. L'Église a institué des parrains-marraines pour être les parents spirituels des enfants, après le décès éventuel des parents naturels. Ce n'est que lorsque l'enfant était assez fort pour suivre son père aux champs ou l'accompagner à l'armée qu'il rentrait sous l'autorité directe du père. Les garçons des Juifs sont déclarés aptes à suivre leur père à 13 ans, une fois leur Bar-Mitsvah accomplie. Bar-Mitsvah se traduit "Fils de la Loi". Les garçons sont en effet à l'âge de responsabilité devant Dieu à partir du jour où ils sont capables de lire la Torah et de l'expliquer, c'est-à-dire d'en tirer la substantifique moelle. Il ne s'agit pas de l'interpréter.

 

Paul se souvient de son enfance (Galates 4/3) : « Nous aussi, lorsque nous étions des enfants, nous étions asservis sous les rudiments du monde ». L'éducation a pour rôle d’enseigner à obéir. La politique de l'enfant-roi est en réalité une démission parentale : comment voulez-vous que les enfants apprennent à obéir si les parents n'obéissent à personne, et surtout pas à Dieu ? On se plaint aujourd'hui de l'insécurité, on installe des systèmes d'alarme dans nos voitures, dans nos maisons, et nous fermons les portes à double-tour, parce que l'obédience fait défaut parmi nos semblables. Or, si nous ne sommes pas soumis à Dieu, alors nous sommes soumis au diable. Et c'est précisément de cette soumission au diable que Christ est venu nous libérer, comme nous le disons dans la prière du Notre père : "Délivre-nous du mal - ou délivre-nous du malin". Christ nous enseigne l'obédience au Père éternel, et Il nous en donne l'exemple par Sa vie et par Sa mort sur une croix, l'instrument de torture dédié aux serviteurs insoumis, parce qu'Il portait nos désobéissances pour les laver avec Son propre Sang.

 

Et c'est dans la soumission à Ses parents terrestres et à Son Père céleste que Christ est né (Galates 4/4) : « Mais quand l'accomplissement du temps est venu, Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme, [et] soumis à la Loi. Afin qu'il rachetât ceux qui étaient sous la Loi ». Nous sommes en principe sous la Loi, mais en pratique, c'est une autre affaire ! Les églises sont désertées car on ignore l'obédience de la première Table de la Loi de Moïse, laquelle précise nos devoirs envers Dieu. On préfère les idoles que l'on voit - parce qu'elles sont fabriquées par des hommes - au seul Dieu véritable que l'on ne voit pas. (Exode 33/19-23) : À Moïse, « [Dieu] dit : Je ferai passer toute ma bonté devant ta face, et je crierai le nom de l'Éternel devant toi ; et je ferai grâce à qui je ferai grâce, et j'aurai compassion de celui de qui j'aurai compassion. Puis il dit : Tu ne pourras pas voir ma face ; car nul homme ne peut me voir, et vivre. L'Éternel dit aussi : Voici, il y a un lieu par-devers moi, et tu t'arrêteras sur le rocher ; et quand ma gloire passera, je te mettrai dans l'ouverture du rocher, et te couvrirai de ma main, jusqu’à ce que je sois passé ; puis je retirerai ma main, et tu me verras par derrière, mais ma face ne se verra point. ». Souvenez-vous aussi de la femme de Lot, qui voulut regarder en arrière vers la destruction de Sodome, pour voir si elle ne verrait pas Dieu à l'œuvre (Genèse 19/22-26) : « Hâte-toi, sauve-toi là, car je ne pourrai rien faire jusqu'à ce que tu y sois entré ; c'est pourquoi cette ville fut appelée Tsohar. Comme le soleil se levait sur la terre, Lot entra dans Tsohar. Alors l’Éternel fit pleuvoir des cieux, sur Sodome et sur Gomorrhe, du soufre et du feu, de la part de l’Éternel ; et il détruisit ces villes-là, et toute la plaine, et tous les habitants des villes, et le germe de la terre. Mais la femme de Lot regarda en arrière, et elle devint une statue de sel ». Dieu ne peut rien faire sans être vu. C'est pourquoi il ordonne par la voix de l'ange qui accompagnait la famille de Lot hors de Sodome de ne pas Le regarder (Genèse 19/17) : « Sauve ta vie, ne regarde point derrière toi, et ne t'arrête en aucun endroit de la plaine ; sauve-toi sur la montagne, de peur que tu ne périsses ». La clé du bonheur est dans l'obédience. Soumettons-nous à Dieu et ne cherchons pas à Le voir, ni à savoir plus que ce qu'Il veut bien nous révéler dans Sa Parole, la Sainte Bible.

 

Et ceux que le Père a prédestinés à être Ses enfants, Dieu les adopte ; (Galates 4/5) continue : « Afin qu'il rachetât ceux qui étaient sous la Loi, et que nous reçussions l'adoption des enfants ». Notez que nous recevons l'adoption divine, car c'est là une grâce qu'on ne peut ni mériter, ni acheter, ni décider à la place de Dieu. Une fois qu'Il nous a adoptés par la nouvelle naissance en la Foi, Dieu nous considère comme Ses enfants. Mais des petits enfants, comme Jésus dans la crèche, à Noël. Des enfants dont la Vie dépend de leur Père, des enfants nourris par leur mère : l'Église qui leur dispense le Pain de la Parole descendue du Ciel, et nous sommes des enfants animés par l'Esprit de Dieu ; (Galates 4/6) : « Et parce que vous êtes enfants, Dieu a envoyé l'Esprit de son Fils dans vos cœurs, criant Abba, [c'est-à-dire] Père. ». Notre adoption fait de nous des frères, cohéritiers du Père avec Christ, le serviteur souffrant et obéissant jusqu'à la mort.

 

Paul conclut ainsi ce passage de l'Épître aux Galates (4/7) : « Maintenant donc tu n'es plus serviteur, mais fils ; or si tu es fils, tu es aussi héritier de Dieu par Christ ». En quoi consiste donc cet héritage divin, reçu du Père éternel ? Rien moins que l'éternité de Dieu, par Dieu, avec Dieu et en Dieu. Mais souvenons-nous que les fils de Dieu Lui sont soumis jusqu'à la mort, comme Christ notre grand frère, le premier ressuscité d'entre les morts. Et alors même que nous serons ressuscités avec Christ dans le Ciel, nous serons toujours les enfants du Père, qui instillera l'obédience en nous (Hébreux 8/11) : « Et chacun n'enseignera point son prochain, ni chacun son frère, en disant : Connais le Seigneur ; parce qu'ils me connaîtront tous, depuis le plus petit jusqu'au plus grand d'entre eux ». Tel est notre avenir, si nous persévérons dans l'obédience chrétienne jusqu'à la fin, et encore dans l'au-delà.

 

Tr. Révd Yves Méra, évêque AOC France

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